Le voyage
Préambule
Le voyage représente une partie significative de la mission, en effet au plus court, il durera environ 360 jours. De plus celui-ci représente un défi technique à relever, étant donné qu'aucun humain n'a voyagé aussi longtemps et aussi loin jusqu'à présent.
La distance Terre/Mars
Mars est la planète la plus proche de la Terre. Pourtant elle est loin. Très loin. En fait elle est tellement loin qu’il faut plus de 4 minutes et 30 secondes en moyenne pour parcourir la distance qui nous en sépare avec le phénomène le plus rapide de l’univers, la lumière, qui voyage pourtant à près de 300 000 kilomètres par seconde ! Plus précisément, la distance Terre/ Mars varie entre 54 et 401 millions de kilomètres avec une moyenne à 76 millions de kilomètres. Lorsque Mars est la plus éloignée de nous, il faut alors 22 minutes pour que la lumière parcourt le trajet.

Représentation de la distance Terre/Mars
Cette variation est due aux trajectoires et à la vitesse de rotation des deux planètes autour du soleil. Mars parcourt une orbite beaucoup plus grande que celle de la Terre et varie nettement de vitesse en fonction de sa position par rapport au soleil. En effet, comme nous l'avons déjà vu, la planète a une orbite elliptique assez prononcée par rapport à celle de notre planète qui est presque un cercle parfait. Ainsi lorsqu’elle est au plus proche du soleil, elle atteint 26,499 km/s et 21,972 km/s lorsqu’elle est au plus loin. Alors que la Terre a une plus grande vitesse due à sa proximité avec le soleil et subit moins de variation grâce à son orbite presque circulaire. Ainsi, elles sont le plus rapprochées tous les 780 jours lorsque Mars est en opposition, c’est-à-dire lorsque la Terre s’intercale entre Mars et le Soleil. On dit que la Terre est à son aphélie et Mars à son périhélie. À l’inverse, les deux planètes sont les plus éloignées lorsque Mars atteint son aphélie et la Terre son périhélie. Le résultat de ces différences est que les planètes en parcourant leur orbite, << se rejoignent >> en opposition après des durées différentes de leur propre année. L’année martienne est de 686 jours mais sa période synodale, c’est-à-dire le temps qui sépare deux positions identiques de Mars dans notre ciel terrestre, est de 779,96 jours, soit deux ans et 50 jours (presque 26 mois) car la planète est plus lente que la Terre. Pour mieux comprendre, il faut se dire que Mars rejoint le même point de son orbite toutes les années martiennes, soit 686 jours, mais que pour rejoindre la même configuration Terre/Mars/Soleil il faut attendre 779 jours, ce qu’on appelle la période synodale.

Position de Mars dans notre ciel (rejoint la même position tous les 779 jours = période synodale)
L’orbite de transfert de Hohmann
La trajectoire habituellement utilisée s’appelle l’orbite de transfert de Hohmann du nom de l’ingénieur allemand qui l’a découverte en 1925. Ce type de trajectoire permet de transférer un objet entre deux planètes avec une dépense énergétique minimale en utilisant la vitesse que la Terre possède déjà. En effet, celle-ci file à 108 000 km/h autour de notre soleil. Comme on l’a vu auparavant, Mars est moins rapide, seulement 87 000 km/h, ainsi la différence entre les deux, soit environ 20 000 km/h après avoir quitté l’attraction de la terre et en se plaçant sur son orbite héliocentrique est la vitesse du vaisseau, sans même avoir besoin d’allumer de nouveau ses moteurs. Si l’on considère que l’orbite de Mars et de la Terre sont parfaitement circulaires ce qui, comme on l’a vu, n’est pas le cas, l’orbite de transfert de Hohmann est tangente à l’orbite de la Terre au point de départ et tangente à l’orbite de Mars à l’arrivée. Ce type de trajectoire permet d’effectuer le voyage Terre-Mars en environ 9 mois. Cependant, il serait possible de doter le vaisseau de réservoirs plus conséquents afin d’emprunter des trajectoires plus tendues et plus rapides qui permettraient d’écourter le voyage à 6 mois (131 jours au minimum) mais demanderait une masse de carburant beaucoup plus conséquente. Effectivement, emporter plus de carburant signifie avoir besoin d’une puissance supérieure, donc emporter encore plus de carburant, c’est un cercle vicieux. En outre, aller plus vite implique de dépenser plus d’énergie pour se freiner une fois arrivé sur Mars pour atterrir en douceur sur sa surface, ce qui consomme encore plus de carburant. On appelle cette étape l’insertion orbitale. Car il faut que le vaisseau arrive suffisamment lentement pour être capturé par le champ de gravité martien, sinon il continuera sur son orbite héliocentrique (autour du soleil) en laissant Mars derrière lui ! Pour en avoir une idée plus claire, imaginez que notre vaisseau va à au moins à la vitesse de 20 000 km/h, pour être capturé par la gravité de Mars, il doit freiner jusqu’à au moins 2 700 km/h, ce n’est donc pas un coup de frein banal ! L’utilisation de trajectoires sécantes plus courtes et plus rapides en utilisant les moteurs permet d’avoir une plage de << fenêtre de tir >> plus conséquente, mais nous en reparlerons plus tard.

Orbite de transfert d'Hohmann
Les optimisations possibles
Pour optimiser encore le coût et le temps de trajet, il est possible d’utiliser l’effet de fronde. Il consiste, non pas à utiliser la vitesse de la Terre autour du soleil comme tout à l’heure, mais plutôt sa vitesse de rotation autour d’elle-même. Comme vous le savez la Terre tourne autour d’elle-même, mais surtout à des vitesses différentes en fonction de l’endroit où vous vous trouvez. Par exemple si vous vous trouvez au pôle nord, votre vitesse est nulle. Ainsi, le meilleur point de départ est l’équateur, car c’est le point où la vitesse de rotation est la plus forte. Ainsi rien qu’en restant sur son pas de tir, le vaisseau se déplace déjà à 1650 km/h par rapport au centre de la Terre, ce qui est déjà un plus notable pour atteindre les 40 000 km/h nécessaires pour échapper à l’attraction terrestre. C’est pour cela que certains sites de lancement sont situés près de l’équateur comme Kourou en Guyane ou Cap Canaveral en Floride, qui sont parmi les meilleurs sites de lancement au monde grâce à leurs localisations idéales. Cependant, l’effet de fronde n’est utile que pour les orbites faiblement inclinées sur l’écliptique ou celles empruntées par les sondes interplanétaires comme dans notre cas, et sont purement inutiles pour atteindre des orbites polaires.

Décollage d'une fusée Ariane 5 depuis la base de Kourou en Guyane
Une autre solution pour accélérer le vaisseau sans utiliser du carburant est l’assistance gravitationnelle. Elle permet de modifier sa direction, son inclinaison sur le plan écliptique et surtout sa vitesse. Le principe de l’assistance gravitationnelle est de se servir de la gravité d’un corps céleste quelconque (planète, Lune) pour se propulser dans une direction précise. Pour cela, le vaisseau s’approche du corps céleste en question et finit par rentrer dans sa zone d’influence gravitationnelle (sphère de Hill). Le puit gravitationnel attire de plus en plus le vaisseau qui augmente ainsi sa vitesse, en effet, celui-ci “tombe” vers la planète et donc accélère. Bien évidemment, le vaisseau suit une trajectoire bien précise et calculée à l’avance pour éviter toute collision. Le vaisseau, en avançant, dépasse l’astre et sort progressivement du puit gravitationnel de celui-ci, en perdant petit à petit de la vitesse. A la fin du survol, le bilan vitesse gagnée et vitesse perdue est nul, on a perdu autant de vitesse qu’on en a gagnée. On peut donc penser que la manœuvre était inutile, pourtant la vitesse de la sonde a considérablement augmenté. Lorsque le vaisseau quitte l’influence gravitationnelle de la planète à la fin du survol, sa vitesse vaut la somme vectorielle de sa vitesse initiale et de la vitesse de la planète autour du Soleil, ainsi le vaisseau gagne beaucoup de vitesse (il emprunte de l’énergie et du moment angulaire à la planète). Par exemple, la sonde Nozomi conçue par l’agence Spatiale Japonaise ISAS (Japanese Institut of Space and Astronautical Science) a utilisé l’assistance gravitationnelle de la Lune en y faisant deux fois le tour pour gagner de la vitesse et partir vers Mars. Ce type de manœuvre peut également être effectuée pour freiner le vaisseau, mais nous intéresse moins dans notre cas.

Illustration d'une manœuvre d’assistance gravitationnelle

Trajectoire de la sonde japonaise Nozomi
Fenêtre de tir
Comme nous l’avons démontré tout à l’heure, à cause du type de trajectoire empruntée, il est primordial de bien planifier la date de départ. Lorsqu’on fait le voyage de la Terre jusqu’à Mars, il faut s’assurer que non seulement on rejoindra l’orbite de la planète mais aussi que la planète sera bien là quand on y arrivera ! En effet, lors du lancement, on vise un point de l’orbite de Mars où il n’y a rien. Seulement, le temps qu’on l’atteigne, Mars l’aura rejoint exactement au bon moment. D’où l’importance d’effectuer le lancement en temps voulu et d’être rigoureusement précis. Cette date précise arrive tous les 26 mois (il s’agit encore de la période synodale), on parle alors de << fenêtre de tir >>. Elle arrive lorsque la Terre est située au périhélie et Mars à l’aphélie.
Le trajet aller
Il existe différents scénarios possibles pour aller sur Mars. En simplifiant, il faut tout d’abord allumer les moteurs pour rejoindre une orbite elliptique autour de la Terre (7000 km x 400 000 km) en s’aidant de l’effet de fronde avant de quitter la zone d’influence gravitationnelle de la planète en suivant l’orbite de transfert d’Hohmann en allumant deux fois les moteurs au bon moment. Le reste du temps, plus besoin de moteurs, car en bénéficiant de la vitesse de la Terre autour du soleil, on peut "rattraper" Mars dont la vitesse est moindre. Pour optimiser le voyage, certains scénarios prévoient de bénéficier de l’assistance gravitationnelle d’un corps céleste, le plus souvent la Lune ou Vénus.
Une fois arrivé près de Mars, il faut de nouveau allumer les moteurs pour procéder à une manœuvre d’insertion orbitale qui consiste à freiner le vaisseau jusqu’à au moins 2,3 km/s afin de le mettre en orbite autour de la planète.
Nous voici donc en orbite autour de notre chère planète ! L'atterrissage sur Mars (qu’on nomme EDL : Entry, Descent and Landing) est une phase cruciale qui consiste à descendre la vitesse horizontale du vaisseau à 0 km/h afin de se poser sur le sol. Cela varie en fonction des projets, mais le vaisseau qui aura permis de voyager restera en orbite autour de Mars et un ou plusieurs atterrisseurs seront alors utilisés pour pouvoir se poser. Mars, contrairement à la Terre, a une atmosphère plus fine, qui freine donc moins. l'aérofreinage est donc moins performant. Les différentes agences spatiales et entreprises privées ont alors mis au jour plusieurs techniques afin de se poser en sécurité sur le sol martien. Elles varient légèrement mais la plupart sont fondées sur le même principe. Des parachutes sont d’abord ouverts pour ralentir l'atterrisseur avant d’allumer des rétrofusées pour terminer le freinage. D'autres n'utilisent que l'aérofreinage, mais nécessite d'avoir un temps de descente plus long, en effet pour se freiner suffisamment il faut rester longtemps dans l'atmosphère martienne et avoir un degré d'inclinaison faible par rapport au sol. Space X, prévoient, quant à eux, de ne laisser aucun vaisseau en orbite et de faire atterrir directement la fusée sur Mars grâce à ses moteurs.

Rentrée atmosphérique d'une capsule sur Mars
Vidéo du voyage du rover Curiosity utilisant un parachute et des rétrofusées pour se poser
Cependant, d'autres projets, comme celui de Space X, prévoient quant à eux de ne laisser aucun vaisseau en orbite et de faire atterrir directement la fusée sur Mars grâce à ses moteurs.
Projet de voyage vers Mars de la fusée BFR de Space X, le module supérieur se posant directement sur Mars
Durée du séjour sur Mars : scénarios de conjonction ou d'opposition
Il existe deux scénarios possibles pour effectuer une mission vers Mars. Pour l’instant ce sont les seuls réalisables.
Le premier, appelé scénario de conjonction, est une mission de 910 jours au total. Elle comprend 180 jours aller, 550 jours sur place et 180 jours retour. Ce scénario optimise un maximum la durée de l'aller et du retour en la réduisant à 180 jours. Pour cela, les astronautes devront rester 550 jours sur place pour que Mars et la Terre soit de nouveau dans une position idéale pour un retour. En effet 180 + 550 = 730 jours, soit environ la période synodale de 26 mois. On l'appelle scénario de conjonction car, lors du départ depuis Mars, la planète et le soleil sont le plus proche dans le ciel terrestre. Ce type de mission a pour avantage de permettre de rester plus longtemps sur Mars et de passer moins de temps dans l’espace.
Le deuxième scénario, appelé scénario d’opposition, est une mission de 640 jours. Elle comprend 180 jours aller, 30 jours sur place et 430 jours retour. En effet, au lieu d’attendre la nouvelle période synodale, le vaisseau décolle au bout de 30 jours pour revenir sur Terre. Comme la Terre et Mars ne seront plus dans une position idéale, le retour est beaucoup plus long, 430 jours mais est cependant réduit en bénéficiant de l'assistance gravitationnelle de Vénus. On l'appelle scénario d’opposition car, lors du départ depuis Mars, la planète et le soleil sont à l’opposé dans le ciel terrestre. Le seul avantage de ce type de mission est de réduire la durée totale du voyage à 640 jours.
Cependant, 30 jours ne sont pas suffisants pour faire toutes les expériences scientifiques et ne permettent pas de réaliser l'exploration de l'ensemble de la zone au sol pouvant être atteinte grâce aux systèmes de mobilité mis à disposition de l'équipage. De plus, une trop grande durée de voyage augmente les risques liés à celui-ci et exige de trouver un moyen pour subvenir aux besoins vitaux des astronautes durant l'expédition. C’est pour cela que tous les projets retiennent le scénario de conjonction, et c’est celui-ci que nous étudierons dans la suite de notre présentation.

Déroulement des scénarios d'opposition et de conjonction : 1 = Lancement de l'équipage, 2 = Atterrissage sur Mars, 3 = Décollage du sol de Mars, 4 = Assistance gravitationnelle de Vénus (scénario d'opposition uniquement), 5 = Retour sur Terre.
Le trajet retour
Avec le budget et les technologies actuelles, il est très complexe, voire impossible d’envoyer un vaisseau capable d’effectuer un aller et un retour sans se faire ravitailler en carburant. Il est ainsi prévu que l'atterrisseur soit ravitaillé in situ sur Mars avant de redécoller. Comme nous le mentionnions, le scénario de conjonction est celui retenu par la plupart des projets. La trajectoire empruntée pour le retour, à savoir celle de l’orbite de transfert de Hohmann, reste donc la même mais en sens inverse.
Il faut d’abord décoller de Mars en utilisant un ou des moteurs pour s’arracher à la pesanteur martienne et rejoindre son orbite. S’il s’agit d’un voyage direct, comme pour le projet de Space X, le vaisseau s'insère directement sur une trajectoire de retour et s’il s’agit d’un voyage semi-direct, comme celui prévu par la Nasa, il s'amarre d’abord au vaisseau resté en orbite avant que le tout s’éjecte vers une trajectoire de retour.
Une fois arrivé dans la banlieue de la Terre, le vaisseau rallume ses moteurs pour freiner et se mettre en orbite autour d’elle. Il faut descendre la vitesse à un minimum de 11 km/s. Il ne reste ensuite plus qu'à réaliser la rentrée atmosphérique. Pour cela, on utilise le plus souvent (quand on se pose sur Terre) un aérofrénage qui consiste simplement à se laisser freiner par les couches denses de l’atmosphère en s’équipant d’un bouclier thermique pour éviter que le vaisseau ne soit détruit. Une fois assez ralenti, on ouvre des parachutes et on peut alors effectuer une descente en douceur… ou presque, du moins à environ 3 m/s.

Illustration de la capsule Dragon Crew de Space X décollant depuis le sol de Mars

Illustration du décollage de la fusée BFR de Space X depuis Mars
Lanceurs et vaisseaux
A l’heure actuelle, plusieurs prototypes de vaisseaux ont été proposés. Les deux scénarios qui reviennent le plus souvent sont l’assemblage d’un vaisseau en orbite basse grâce à plusieurs fusées, appelés lanceurs, envoyant chacun une partie de celui-ci, ou l’envoi directe par des lanceurs de plusieurs vaisseaux vers Mars. Il est aussi possible de combiner les deux scénarios en assemblant plusieurs vaisseaux en orbite basse afin de les envoyer vers Mars. On peut soit envoyer le tout directement, ce que l’on appelle un lancement simultané, ou soit, dans un premier temps, envoyer les vaisseaux contenant le matériel nécessaire puis, dans un second temps, envoyer les astronautes, ce que l’on appelle un pré-déploiement. Nous ne détaillerons pas tous les prototypes de vaisseau déjà existants, tant ils sont nombreux, mais nous allons vous présenter l’essentiel.

Les trois vaisseaux d'un scénario imaginé par la NASA en 2009 lancés en pré-déploiement
Pour envoyer les vaisseaux abritant les astronautes et la charge utile en orbite basse puis sur Mars, il faut utiliser des lanceurs, plus communément appelés « fusées ».



De gauche à droite les lanceurs : SLS (Space Launch System) de Boeing, BFR (Big Flacon Rocket) de Space X, Delta IV Heavy de United Launch Alliance
Le type de propulsion est une partie obligatoire à étudier pour la composition d’un lanceur capable d’effectuer un voyage interstellaire. Aujourd’hui, il existe trois types de propulsions majeures envisageables ( d'autre système de propulsion existent comme le moteur à plasma ou la voile solaire mais ne sont qu'à l'état de projet) :
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La propulsion chimique
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La propulsion nucléaire thermique
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La propulsion ionique
Les moteurs chimiques présentent l’avantage de fournir une poussée forte et efficace mais nécessite une grande masse d’ergol.
La propulsion nucléaire ou nucléo-thermique est un mode de propulsion des fusées qui utilise un réacteur nucléaire pour chauffer un fluide propulsif. Ce type de propulsion permet d’atteindre des vitesses théoriques d’éjection des gaz bien plus élevées et permet ainsi d’obtenir un meilleur rendement que la propulsion chimique. Cependant, ce type de propulsion n’en n’est qu’à ses balbutiements et encore aucune fusée ne l’a expérimenté. En effet, l’utilisation de moteurs nucléaires engendre un risque et un coût financier considérable. Ce type de moteur n'est cependant pas exclu (par la NASA notamment).

Schéma d'un moteur nucléaire
Les moteurs ioniques, quant à eux, sont des moteurs qui projettent des ions à très grande vitesse pour produire une poussée. Ils ne brûlent pas le carburant mais l’ionise, à savoir, qu’ils enlèvent ou ajoutent des charges à une molécule ou à un atome. L’avantage de ce type de propulsion est d’utiliser nettement moins de carburant, mais oblige à avoir une poussé moindre et ne permet donc pas d’effectuer un voyage assez court pour la survie de l’homme, il n'est donc pas envisagé.

Schéma d'un moteur ionique
Ainsi le seul moyen de propulsion utilisable actuellement pour une mission habitée vers Mars est la propulsion chimique, mais il se peut que dans le futur des moyens de propulsion plus efficaces deviennent opérationnels comme la propulsion nucléaire thermique ou les moteurs à plasma.
Le moteur chimique ou plus communément « moteur-fusée » est un type de moteur à réaction. Il projette un fluide qui peut être un gaz ou un liquide qui transmet par réaction une poussée de force égale et de direction opposée, vers le dessous de la fusée. Ce type de moteur est autosuffisant, c’est-à-dire qu’il expulse une matière entièrement stockée dans le corps du véhicule afin de pouvoir fonctionner dans un milieu dépourvu d’atmosphère. Un moteur-fusée produit une poussée en expulsant des gaz qui sont produits par une réaction chimique exothermique dans une chambre de combustion et accélérés par une tuyère, appelée la tuyère de Laval. Il existe deux principaux types de moteurs-fusées :
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Les moteurs-fusées à ergols solides
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Les moteurs-fusées à ergols liquides
Les moteurs-fusées à ergols solides sont les plus simples et les moins coûteux. Ils permettent de fournir une grande poussée en très peu de temps. En revanche, une fois allumés, ils ne peuvent plus être éteints. Ils sont donc généralement utilisés durant le décollage comme propulseur d’appoint. L’ergol solide est le plus souvent disposé en canal dans le réservoir pour avoir une surface de combustion la plus grande possible. Il peut présenter des motifs particuliers, en étoile en « U » ou en rond pour moduler la vitesse de combustion. Les ergols utilisés peuvent être du Monergol à base de nitrocellulose, du Nitrate d'ammonium, du Perchlorate d'ammonium ou encore du Zinc-Soufre.

Schéma d'un moteur à ergol solide
Les moteurs-fusées à ergols liquides utilisent des ergols stockés dans des réservoirs séparés. Ils sont accélérés par des turbopompes avant d’être injectés par les injecteurs dans une chambre à combustion. Les ergols sont injectés dans des proportions stœchiométriques pour assurer une combustion complète de ceux-ci. Ces gaz sont ensuite éjectés à très grande vitesse par une tuyère de Laval qui les détend et les accélère. Pour alimenter la chambre de combustion en ergols, il existe deux solutions. On peut pressuriser les réservoirs pour éjecter les ergols à grande vitesse. Cependant, ce type de système est peu utilisé car il nécessite de renforcer les réservoirs à cause de la pression et augmente la masse totale de la fusée. On utilise alors des turbopompes dont le rôle est d’accélérer les ergols. Ces pompes peuvent être actionnées grâce à différents systèmes utilisant les ergols déjà présents. Il existe trois types de cycle :
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Cycle à expandeur
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Cycle à générateur de gaz
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Cycle à combustion étagée
Nous n’allons par rentrer dans les détails car ces processus sont très compliqués mais le cycle le plus utilisé est le cycle à générateur de gaz, utilisé par exemple par les moteurs des fusées Arianes. Il utilise une fraction des ergols du réservoir et les brûle. Les gaz produits entraînent les turbines des turbopompes qui tournent à plusieurs milliers de tours par minute puis sont rejetés sans passer ni par la chambre à combustion ni par la tuyère. Le reste de l’ergol peut ainsi être accéléré par les turbopompes. Ce cycle n’est pas le plus efficace car une partie des ergols est perdue. C’est pour cela que le cycle à combustion étagée a été créé, il permet en effet d’utiliser l’ensemble des ergols pour la poussée et actionne en même temps les turbopompes. Cependant ce système demande des moteurs compliqués, lourds et chers, il est ainsi moins utilisé.
Pour enflammer les gaz, les moteurs peuvent être pourvus de systèmes d’allumage. Sinon une autre technique consiste à utiliser des ergols hypergoliques qui s’enflamment spontanément une fois mis en contact ou exposés à du dioxygène.
Un circuit de refroidissement est utilisé pour refroidir la chambre de combustion et la tuyère. Il utilise généralement directement le comburant qui est le plus souvent des ergols liquides cryogéniques stockés à très basse température.
Les principaux couples d’ergols sont :
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Acide nitrique-kérosène
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Hydrogène liquide-oxygène liquide (LOX)
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Peroxyde d'hydrogène
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Oxygène-hydrazine
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Peroxyde d'azote-kérosène
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Peroxyde d'azote-1,1-diméthylhydrazine

Schéma d'un moteur à ergol liquide

Photo d'une des turbopompes du moteur Vulcain équipant le lanceur Ariane 5
Les moteurs-fusées à ergols liquides sont beaucoup plus performants que les modèles à ergols solides ; ils sont néanmoins plus complexes à concevoir, à fabriquer et à utiliser. Ils sont majoritairement utilisés pour les étages principaux. En effet, ils ont l’avantage de pouvoir facilement contrôler la poussée en contrôlant la combustion et permettent de les éteindre et de les rallumer plusieurs fois de suite.
Les fusées sont envoyées en suivant des étapes appelées « stages ». Des boosters d’appoint et plusieurs étages permettent l’utilisation de plusieurs moteurs, adaptés à l’endroit où ils se trouvent, comme au sol, dans la haute atmosphère, ou dans le vide spatiale. Ils permettent également d’alléger la fusée au fur et à mesure que les réservoirs se vident.

Séparation des boosters à ergol solide d'appoint du lanceur Ariane 5
Avec les technologies actuelles, nos lanceurs sont capables d’envoyer une centaine de tonnes en orbite basse. La fusée la plus puissante que l’homme a créée reste Saturne V, la fusée utilisée pour le programme Apollo, et qui est capable de placer 110 tonnes en orbite basse. En utilisant de nouveaux procédés de fabrication, comme l’impression de certaines pièces en 3D ou l’utilisation de nouveaux matériaux comme du composite à base de fibre de carbone, les ingénieurs pensent pouvoir fabriquer des lanceurs capables d’envoyer 130 tonnes en orbite basse, comme la fusée en développement par la NASA nommée SLS (Space Launch System).

Saturne V, le lanceur des missions Appolo
Pour placer l’ensemble de la masse nécessaire à la mission, soit entre 600 et 1 200 kg , il faudrait au minimum le tir de 7 lanceurs selon la Nasa.
Que ce soit dans le cas d’assemblement des vaisseaux en orbite basse ou l’envoi direct des vaisseaux vers Mars, comme le prévoit le projet de Space X qui utilise la fusée BFR (Big Falcon Rocket), certains vaisseaux contiendront le matériel nécessaire à la survie des astronautes sur Mars et d’autres abriterons directement ceux-ci. Ces vaisseaux devront alors être équipés de systèmes afin de garantir la survie des astronautes dans le vide spatiale. Etant donné qu’ils se retrouveront dans le vide, il sera impossible de produire quoi que ce soit, tout doit être emporté. L’oxygène est stocké sous forme liquide pour prendre moins de place. L’eau est recyclée à 95% par des systèmes afin d’être réutilisée (nous en parlons dans la partie III-). La nourriture peut soit être emportée, soit produite par des biosphères qui permettraient également la création d’oxygène par réaction de photosynthèse. L'électricité est fournie par des panneaux solaire ou par un générateur à fission nucléaire.

Illustration de cultures de plantes dans un vaisseau spatiale
Le vaisseau transportant les astronautes pourra être muni d’un système imitant la gravité grâce à la force centrifuge comme vous pouvez le voir ici et devra aussi être équipé de blindage contre le rayonnement solaire et cosmique mais nous en reparlerons plus tard.

Illustration d'un système centrifuge permettant de simuler une gravité
Chaque vaisseau devra être équipé d’un atterrisseur pour qu’une fois arrivé en orbite autour de Mars, il puisse poser le matériel sur sa surface. Le vaisseau transportant les astronautes et qui reste en orbite pour attendre le retour de ceux-ci devra également être équipé d’une capsule pour permettre la rentrée atmosphérique sur Terre.
Les risques liés au voyage
Le transport représente une partie non-négligeable du voyage. Il est important que le voyage soit le plus court possible. En effet, un séjour trop long dans l’espace peut avoir de nombreuses conséquences sur l’homme.
A cause de l’absence de gravité, ce que l’on nomme “apesanteur”, de nombreux problèmes se répercutent sur le corps humain. Malgré des entraînements physiques intenses et réguliers dans l’espace, les astronautes perdent en masse musculaire et en masse osseuse. Leur densité de minéraux dans les os diminue de 1 à 2% par mois. La perte de masse fragilise et dégrade les os. Cela s’accompagne d'une mauvaise circulation sanguine car le sang n’est pas attiré vers les jambes du fait de l'absence de gravité. Ce qui se traduit par un vieillissement des artères fémorales et carotides qui vieillissent de 20 à 30 ans en l’espace de six mois.
Les sens peuvent être également défectueux dans l’apesanteur. Les liquides de l’oreille interne qui se nomment endolymphe et périlymphe et qui permettent l’équilibre ne réagissent pas comme sur Terre. La vue, elle, se brouille à cause d’une hypertension intracrânienne provoquant ainsi une baisse de l’acuité visuelle. On observe aussi un allongement de la colonne vertébrale qui peut faire grandir les astronautes de plusieurs centimètres.
Différentes machines dévouées à l'activité sportive sont installées à bord pour remédier à l’atrophie musculaire dont souffrent les astronautes. Ils doivent effectuer au moins deux heures d’activité sportive toutes les 24 heures.
Vidéo montrant les exercices réalisés dans l'ISS pour maintenir les astronautes en forme
Une solution à ces problèmes est proposée par de nombreux scientifiques, celle de la pesanteur artificielle. Afin de remédier à cette apesanteur, on effectuerait une rotation du vaisseau qui permettrait de générer une force comparable à la gravité, la force centrifuge. Ce principe reste toutefois encore théorique et serait à l’origine de dépenses conséquentes.
Un autre défi important à relever est celui des rayonnements solaire et cosmique. Sur Terre, le champ magnétique et la couche d’ozone de la planète protègent l’homme des rayonnements émis par le soleil et par le cosmos. Celui-ci étant absent dans l’espace, les astronautes se retrouvent sans protection. Voyons à présent quels sont les effets de ces rayons sur le corps humain.
Premièrement, les cellules sont attaquées en profondeur par ces rayonnements. Elles sont soumises, entre autres, à des rayons X qui endommagent gravement leur noyau. En effet, les protéines réparatrices de l’ADN migrent très vite vers les noyaux. De même, des particules très énergétiques tels que les protons ainsi que des particules alpha, comme un noyau d’Hélium, la particule alpha étant constituée de deux protons et deux neutrons, brisent l’ADN. Ces particules s’entrechoquent avec les molécules d’ADN et cassent leurs liaisons. On observe alors des mutations des cellules : celles-ci prolifèrent. Par exemple, les futurs occupants d'une mission habitée vers Mars seront soumis quotidiennement à une dose de radiations de 1,8 milli sieverts, soit environ 0,7 sieverts pour l’aller-retour, d'une durée d'environ 1 an au mieux comme nous l'avons vu. Pour comparaison, sur terre durant le même laps de temps, la dose de radiation est de 0,003 sieverts… Sans aucune éruption solaire, le taux est déjà très élevé par rapport à la terre mais peut devenir particulièrement problématique dans le cas contraire. Les scientifiques envisagent donc plusieurs techniques afin de les stopper. Les réservoirs d’eau pourraient par exemple entourer le vaisseau afin d'arrêter les rayonnements. Des matériaux spéciaux peuvent également être utilisés comme le blindage. La Nasa travaille actuellement sur un plastique nommé polyéthylène (ou RXF1) qui serait capable de servir de bouclier. Enfin, d’autres envisagent encore de créer une bulle de plasma autour du vaisseau. Pour cela, il est envisagé de déployer un filet, fabriqué à partir de matériaux supraconducteurs et parcouru en permanence par un courant électrique afin de générer une bulle de plasma. Celle-ci serait aussi efficace qu’une couche d'aluminium d'une dizaine de centimètres d'épaisseur. Cependant, de telles technologies ne sont pas encore totalement au point.

Illustration d'une boule de plasma autour du vaisseau

Illustration des effets d'un long séjour en apesanteur sur l'organisme
Conclusion
La création et l’envoi du vaisseau sur Mars ne pose pas de problèmes majeurs, mais certains points techniques doivent encore être résolus. Les rayonnements solaires et cosmiques, ainsi que la survie des astronautes dans le vaisseau, ou l’atterrissage (en effet jusqu’à aujourd’hui seuls moins de 900 kilogrammes ont été posés sur Mars alors que l’on doit parvenir à poser entre 30 et 40 tonnes) seront les parties les plus difficiles à réaliser.